φ des math.

4) Essence & rôle des math.

4-1) Origine des notions ou des êtres mathématiques.

Nous avions déjà posé l'existence d'objets ou de notions mathématiques mais sans étudier encore d'une façon explicite leur origine et leur nature. La question est d'importance, elle touche à l'essence même des Mathématiques. Aussi prête-t-elle à controverse notamment dans le conflit de l'Empirisme et du Rationalisme.

Le point de vue empiriste.

exposé

Au regard de l'empirisme, les notions mathématiques sont simplement extraites des données de la perception ; ce sont des copies stylisées et dépouillées jusqu'à l'abstraction des objets ou des figures qui se présentent à nous dans l'intuition sensible. Ainsi : les figures euclidiennes dérivent des formes naturelles, le nombre dérive des collections concrètes observables et l'espace géomé­trique, de l'espace que perçoivent nos sens. Leur naissance s'explique par un travail de schématisation en tous points comparable à celui par lequel les concepts se forment à partir des sensations, des images et des souvenirs. Les notions mathé­matiques sont précisément des concepts qui ont eu à l'origine un contenu sensible ou imagé.

discussion

Si l'origine concrète des notions mathématiques paraît valable aussi longtemps qu'on s'en tient aux formes élémentaires de la Géométrie et de l'Arithmétique (figures simples, nombres naturels), il semble plus difficile sinon impossible d'y croire dès qu'on s'élève au niveau de l'Algèbre et de la Géométrie supérieures. Comment soutenir, avec vraisemblance, que les nombres imaginaires, les équations complexes, les hyperespaces dérivent de l'intuition sensible ?

Le point de vue rationaliste.

exposé

Pures créations de l'esprit, les notions mathématiques sont tirées de la substance même de la raison. Elles ont un caractère a priori, idéal ou irréel et ne sont rien en dehors de ce mouvement de la pensée qui leur donne l'être. Rien ne leur correspond exactement dans le monde extérieur. Sans parler des mathématiques supérieures que leur degré d'abstraction soustrait à l'explication empiriste, on peut montrer que le nombre, la figure, la droite n'existent pas dans le réel et ne peuvent en conséquence être objets de perception, en raison même de leur perfection rationnelle. On est porté à croire le contraire en vertu de l'évidence sensible qu'on a longtemps prêtée à la géométrie euclidienne ou à l'arithmétique élémentaire alors qu'elles sont en fait solidaires d'une axiomatique conçue par l'esprit. Tout ce que l'intuition sensible peut faire, en ce domaine, c'est de nous suggérer certaines formes ou certains rapports qui n'accéderont à la dignité mathématique que par l'effet d'une activité constructive rationnelle.
En tant qu'objets d'intuition, les êtres mathématiques sont vus dans l'intuition rationnelle et non dans l'intuition sensible. Certes nous percevons la droite, le cercle, le triangle ou même l'équation mais nous pensons essentiellement à leurs propriétés abstraites. Les figures pourraient être mal tracées sans que rien fût changé à leurs propriétés géométriques intrinsèques. C'est le sens qu'il faut donner à la fameuse boutade : la géométrie est l'art de raisonner juste sur des figures fausses. En voyant la figure sensible nous regardons ou visons à travers elle la figure intelligible par un acte d'intuition rationnelle. Le sensible n'est jamais que le support ou la figuration de l'intelligible, il est ce par quoi un objet tout abstrait prend existence sur le plan perceptif où il se trouve projeté. Projection qui serait inutile si l'entendement supportait un tel degré de contention qu'il pût se passer de recourir à l'image.

discussion

A la thèse rationaliste, deux sortes de difficultés peuvent être opposées.

Les paragraphes suivants ont pour objet de répondre à ces questions.

4-2) L'application des Mathématiques à l'expérience.

La Physique mathématique existe, c'est un fait. DESCARTES et GALILéE en furent les créateurs, GALILéE lorsqu'il voyait dans le monde un livre écrit en langage mathématique, DESCARTES lorsqu'il déclarait : « Je ne reçois pas en ma Physique d'autres principes que ceux que je reçois en Mathématiques. » Mais l'existence de la Physique mathématique fait problème ou plutôt sa possibilité, car elle semble paradoxale.
Le paradoxe c'est que les notions mathématiques puissent s'appliquer à l'expérience avec bonheur, encore qu'elles en soient indépendantes en principe et en vertu de leur nature.
A cette difficulté trois réponses peuvent être faites :
La solution empiriste.

exposé

Elle consiste à dire que l'application des notions mathématiques à l'expérience physique, n'a rien de surprenant puisque ces notions dérivent déjà de l'expérience, du moins par le canal de l'intuition sensible. Il se produit un double mouvement, un va-et-vient du concret à l'abstrait et de l'abstrait au concret en retour. L'esprit, en cette affaire, ne fait que rendre à la nature son bien. Des notions qui gardent un riche souvenir de l'expérience ne peuvent manquer de s'appliquer à elle tout naturellement.

discussion

L'accord entre l'esprit et la nature est ici constaté purement et simplement plutôt qu'expliqué. D'ailleurs il est loin d'être parfait et il n'est pas établi une fois pour toutes.

La solution rationaliste, à tendance idéaliste.

exposé

Sans en donner la justification métaphysique rappelons que pour l'idéalisme le monde n'est pas à proprement parler extérieur à l'esprit puisqu'il n'est autre que l'ensemble des représentations de la pensée. Le monde est de la réalité de l'esprit et l'esprit est la seule réalité. De sorte que l'esprit, quand il mathématise la nature, ne fait jamais que s'appliquer à lui-même ses principes mathématiques. BRUNSCHVICG enseignait que le monde est un réseau d'équations et de fonctions. Mais c'est HEGEL qui a donné la formule la plus saisissante de l'identité foncière du rationnel et du réel. « Il n'y a de réel que le rationnel et il n'y a de rationnel que le réel. » Sans aller aussi loin on peut voir dans les Mathématiques l'armature ou le fond d'une réalité qui serait pénétrée de rationalité.

discussion

Il faudrait discuter les postulats idéalistes. Retenons seulement que l'identité du rationnel et du réel n'est qu'une limite jamais atteinte en tant que telle. Elle ne saurait avoir de sens que pour une intelligence divine. La tendance des idéalistes consiste précisément à dire de la pensée humaine ce qui ne peut être dit que de la pensée divine, encore que leur idée de Dieu soit des moins claires. Au regard de Dieu rien n'est extérieur à l'esprit qui pense et crée toutes choses.
Au regard de l'homme il n'en va pas ainsi. La nature s'impose à nous comme un donné que l'esprit peut ordonner mais qu'il ne crée pas. C'est pourquoi monde mathématique et monde physique ne coïncident pas au point de s'identifier. Il subsiste un décalage, une inadéquation entre les constructions de la raison et les structures du réel. L'expérience nous révèle du nouveau, quelque chose aussi qui résiste à la raison et même la déconcerte. Ce qui explique que la science doive reprendre sans cesse son œuvre inachevée. Le monde extérieur ne se déduit pas, en Physique, des seules spéculations de la Mathématique pure.
La solution réaliste (Réalisme métaphysique).

exposé

On dira que l'univers, sans être identique à l'esprit, n'en possède pas moins une structure mathématique. Des possibilités de correspondance existent en conséquence. La pensée et la réalité sont construites sur un plan de symétrie profonde qui fait songer à l'harmonie préétablie dont nous parle LEIBNIZ. Une même logique, une même dialectique semblent habiter l'esprit et le monde. Alors l'application des mathématiques à l'expérience physique n'est qu'un cas particulier de cet accord ontologique. Accord qui n'exclut pas l'inadéquation partielle du rationnel et du réel cherchant à se rejoindre dans une science en perpétuel devenir, dans une sorte de dialogue où la nature ne se lasse pas de fournir ni la pensée de concevoir, selon le mot de PASCAL.

discussion

Une telle solution à la fois rationaliste et réaliste paraît très satisfaisante.
Encore faut-il donner la raison de cet accord, de cette correspondance. Les matérialistes se contenteraient de dire que c'est un fait, la logique de l'esprit reflétant celle du monde. Pour les spiritualistes la raison profonde de cet accord est dans l'acte de la pensée divine qui rend possible cette correspondance par l'unité qu'elle confère à la création.

Nous allons examiner le rôle des Mathématiques dans les sciences et dans la connaissance de l'univers.

4-3) Le rôle des Mathématiques.

ARISTOTE disait des Mathématiques que leur noblesse est de ne servir à rien. Nous savons pourtant quelle emprise elles ont sur la nature. Les sciences positives ou expérimentales en ont un impérieux et constant besoin.
Les Mathématiques donnent d'abord un langage aux autres sciences. Langage remarquable par son exactitude, sa rigueur, sa simplicité, sa transparence, sa maniabilité, son univocité ; jeu de symboles permettant d'exprimer les plus diverses relations. CONDILLAC tenait la science pour une langue bien faite ; c'est d'autant plus vrai que la science est davantage mathématisée. Certes cela ne va pas sans difficultés. EINSTEIN disait : « Pour autant que les propositions de la Mathématique se rapportent à la réalité, elles ne sont pas certaines et pour autant qu'elles sont certaines, elles ne se rapportent pas à la réalité. » Nombres et symboles ne s'adaptent pas toujours à la complexité du réel. Malgré cela la mathématisation de la nature fait d'incessants progrès et l'appareil mathématique lui-même est capable de s'assouplir et de s'affiner indéfiniment. C'est pourquoi les sciences y trouvent le langage de leur bonheur.

Les empiristes voudraient même que les Mathématiques n'eussent pas d'autre fonction que d'être un code chiffré de l'expérience, l'expression ou la traduction quantitative et abstraite de ce qui est d'abord concret et qualitatif. Mais les Mathématiques ne servent pas seulement à exprimer dans une langue conventionnelle les résultats de l'expérience.

Les Mathématiques sont un instrument de recherche et de découverte pour les sciences positives. Grâce à la substitution d'un faisceau de relations intelligibles aux objets ou phénomènes naturels, sont rendus possibles des rapprochements originaux, des déductions fécondes. Par le calcul on peut anticiper des lois et même découvrir des faits nouveaux exigés par l'analyse mathématique avant que l'expérience ait pu les révéler. C'est ainsi que l'étude fonctionnelle des phases de phénomènes physiques révèle des propriétés d'abord insoupçonnées. La Mathématique devient un outil de pénétration du réel.

En s'élevant au-dessus de l'expérience par des généralisations abstraites, la pensée mathématique prévoit des phénomènes encore inconnus ou mal connus qu'il faut ensuite établir expérimentalement. En ce sens on a pu dire que le mathématicien sait mieux la Physique que le Physicien lui-même et que c'est à sa science qu'il faut s'adresser pour plonger plus loin dans la connaissance de l'univers. Pourtant ce n'est pas la fin que vise essentiellement la pensée mathématique. En fait il se produit un va-et-vient entre le mathématicien et les autres savants. Comme le remarque LAUTMAN, tantôt le physicien est venu demander au mathé­maticien de lui forger l'outil, tantôt le mathématicien avait établi le traitement mathématique avant que le physicien en ait eu besoin. Tout fait de la nature trouve son expression mathématique et inversement tout nouveau concept peut avoir un jour son interprétation dans la nature.

Ces échanges, ces correspondances entre Mathématiques et sciences de la nature soulèvent encore le problème de l'autonomie des Mathématiques. D'aucuns voudraient que la vraie science fût la Physique en général dont les Mathématiques ne seraient alors que le langage ou l'instrument à titre de science auxiliaire. Il nous semble que c'est vassaliser la Mathématique au bénéfice de la Physique suzeraine. On pourrait soutenir la thèse inverse et dire que la Mathématique est la science suprême puisqu'elle donne la structure intelligible des choses dans la plus haute lumière rationnelle. La Physique et les autres sciences fondées sur l'expérience ne seraient alors que des moyens laborieux de lire cette raison inscrite dans les choses, réfléchie au miroir de l'expérience : elles dévoileraient peu à peu la structure mathématique du monde et s'il arrivait qu'elles fussent un jour achevées, elles pourraient alors disparaître pour laisser place à la Mathématiques se suffisant à elle-même dans la connaissance de l'univers. C'était le rêve de DESCARTES, c'est encore celui d'EINSTEIN, encore qu'il se dise surtout physicien. La rationalisation intégrale des choses ne serait rien de moins que leur totale mathématisation. Conception grandiose mais que nous ne retiendrons pas non plus car la raison d'être de l'expérience ne peut disparaître, sinon pour une intelligence divine qui dominerait le cours des choses en dehors de l'espace et du temps, du point de vue de l'éternel.

Ni la Physique ni la Mathématique ne peuvent se résorber l'une dans l'autre. Leur dualité demeure et nous renvoie à la dualité plus profonde de l'esprit et de la nature, de l'intelligible et du sensible, du rationnel et du réel. On doit écarter aussi bien l'impérialisme d'une Physique souveraine prétendant réduire la Mathématique au rang ancillaire de science auxiliaire, que l'impérialisme d'une Mathématique souveraine privant de raison d'être la connaissance expérimentale du monde extérieur et résorbant la Physique. La Mathématique n'est ni une science subordonnée, ni la seule science. Toutefois elle garde un privilège incontestable qui est que pour être vraies ses conclusions n'ont nul besoin de la vérification expérimentale tandis que les autres sciences ont besoin du concours mathématique pour devenir plus exactes, plus certaines, plus rationnelles.

Limites des Mathématiques.

Toutes les sciences, nous dit BERGSON, tendent aux Mathématiques comme à un idéal. C'est absolument vrai pour les sciences de la nature mais qu'en est-il pour les sciences de l'homme, celles qui le considèrent en tant qu’esprit ? Certes le langage mathématique pénètre aussi dans leur domaine. Sans parler de l'importance de la Statistique en Sociologie ou en Géographie humaine, il est notoire que la Psychologie expérimentale ou objective se mathématise. Ainsi la Psychologie factorielle dont le nom même est suggestif. Pourtant il semble bien qu'il y ait dans la vie spirituelle quelque chose de réfractaire à la mesure, d'irréductible au nombre. On ne calcule pas la profondeur d'un sentiment, la valeur d'une idée, la liberté d'une décision, l'authenticité d'un souvenir ni même la force d'un raisonnement. A plus forte raison ne peut-on chiffrer l'originalité singulière du moi.
En outre les Mathématiques ne s'appliquent pas à toute espèce d'expérience. A côté de l'expérience des laboratoires, où elles ont beaucoup à dire, il y a d'autres formes d'expérience, intérieure, morale, religieuse, esthétique, historique, qui sont en dehors de leur champ d'application, à condition qu'on veuille bien ne pas restreindre la notion d'expérience. Disons que sans rien perdre de leur royauté, les Mathématiques, œuvre de l'esprit, s'appliquent à tout sauf à l'esprit même qui les engendre.

4-4) Qu'est-ce qu'un être mathématique ?

Les considérations précédentes nous auront peut-être permis d'approcher la nature du monde mathématique et des êtres qui l'habitent. Nous négligerons la conception dite nominaliste tendant à voir dans les êtres mathématiques de purs et simples symboles conventionnels et gratuits sans autre existence que celle que leur donne le langage qui les formule. Par contre nous étudierons le conceptualisme rationaliste et le réalisme des essences pour y chercher le vrai visage de l'être mathématique.

Point de vue conceptualiste et rationaliste.

exposé

Les êtres mathématiques ne sont pas autre chose que des concepts. Dérivés ou non de l'expérience, formés a priori ou a posteriori ils n'ont qu'une existence du type conceptuel et -ne sont rien en dehors de l'esprit humain. On les crée par la vertu d'une définition et ils sont par l'essence même qu'on leur donne. D'où la floraison des objets et symboles créés par la pensée.

discussion

Reste à se demander d'où vient l'objectivité que prennent les êtres mathématiques une fois construits par l'esprit. Un nombre, une figure ne peuvent être détruits, ils s'imposent à l'esprit et lui opposent une résistance qui ferait croire à leur objectivité, à leur existence en soi. C'est bien vu dans le passage suivant d'A. GIDE : « Le monde des chiffres et des figures géométriques n'existe pas, il est vrai, en dehors du cerveau qui le crée, mais ce monde une fois créé par le savant lui échappe, obéit à des lois qu'il n'est pas au pouvoir du savant de modifier, de sorte que cet univers né de l'homme rejoint un absolu dont l'homme lui-même dépend. » De plus s'il est vrai qu'il existe une expérience intérieure aux mathématiques mêmes, il faut encore savoir comment il se fait que l'esprit y découvre des propriétés imprévues.

Point de vue platonicien : réalisme des essences.

exposé

Afin de rendre compte de l'objectivité des êtres mathématiques on peut faire appel à la conception platonicienne de l'être, que nous évoquerons en quelques mots. Pour PLATON le monde sensible n'est pas la seule ni la plus profonde des réalités. Il existe un monde intelligible plus réel que l'autre, un monde de choses en soi où sont inscrites, comme des étoiles, des essences existant en elles-mêmes indépendamment du monde sensible, où elles se reflètent, et de l'esprit humain qui les contemple. Telles sont les vérités éternelles : les vérités mathématiques en font partie, l'esprit les reçoit du fond de l'être sans les avoir créées. Les êtres mathématiques sont des essences objectives qui peuplent un secteur du monde intelligible.

discussion

La principale difficulté est que nous avons bien l'impression de donner l'existence aux êtres mathématiques par divers décrets de la raison comme les définitions et les axiomes. Appelons cela la subjectivité des êtres mathématiques, leur dépendance à l'égard du sujet pensant. L'objectivité qu'ils prennent ensuite s'expliquerait par le fait que l'esprit n'est pas séparé de l'être où tombent et s'inscrivent ses créations. « Cet univers né de l'homme rejoint un absolu dont l'homme lui-même dépend. » Mais cet être, qui déborde la pensée humaine, de quelle nature peut-il être si la matière seule existe en dehors de l’esprit ?
La réalité du monde platonicien des essences est difficile à concevoir. Il ne saurait y avoir de réalité intelligible ou de structure intelligible, supérieure aux choses ou intérieure à elles, que par rapport à un esprit, pour un esprit, au regard d'un esprit. L'esprit humain n'y suffisant pas, il ne peut s'agir que de l'esprit divin. Juste­ment chez PLATON les vérités éternelles — Vérité, Beauté, Bien — sont données comme autant de noms de l'être divin. Aussi bien les grands théologiens et métaphysiciens postérieurs au Christianisme feront-ils du monde intelligible, dont font partie les essences mathématiques, soit un monde contemplé par l'intelligence de Dieu, soit un monde intérieur à l'entendement de Dieu. Pour DESCARTES, les vérités éternelles sont inférieures à Dieu, elles sont créées au même titre que les exis­tences. « Les vérités métaphysiques lesquelles vous nommez éternelles, ont été établies de Dieu et en dépendent entièrement aussi bien que tout le reste des créatures. » Il en résulte qu'elles tombent au niveau de l'entendement humain sans avoir été tirées de sa substance.

Solution proposée.

Une conception, inspirée à la fois de DESCARTES et de la Phénoménologie, permettrait de lever la contradiction entre la subjectivité et l'objectivité des êtres mathématiques. Le monde des essences apparaît à l'horizon de la pensée qui le contemple comme une sorte de donné qui, pour être intelligible et non sensible, n'en est pas moins réel et présent. Sa subjectivité tient à ce qu'il n'est visible que dans la lumière de l'intuition rationnelle orientée par l'attention et purifiée par la méthode. Son objectivité tient à son origine trans­cendante. Il est à la fois extérieur et intérieur à la pensée humaine. On l'invente et on le découvre également. Ou tout au moins nous aurions en nous un cer­tain nombre de notions fondamentales innées et données à partir desquelles nous pourrions créer diverses sortes d'êtres mathématiques, ainsi les diverses espèces de nombre à partir de l'essence du nombre en soi.
On peut penser aussi que l'objectivité des êtres mathématiques tient à ce qu'ils sont tout simplement les propriétés abstraites du réel que nous lisons par transparence dans sa structure et que nous en détachons pour les penser à part. Mais c'est renvoyer à la question de savoir pourquoi le réel porte en lui cette structure logique, cette mathématique habitant la nature.

Les Mathématiques et Dieu. La Mathématique et la Métaphysique apparaissent comme liées au niveau de la plus haute réflexion. C'est ainsi que l'idée de Dieu a pu jouer un rôle dans l'interprétation métaphysique des Mathématiques.

L'idée de Dieu est encore susceptible d'être invoquée pour fonder la certitude mathématique. Cette certitude qui demeure indestructible malgré la pluralité des axiomatiques, il faut encore chercher sa garantie dernière. Garantie qui sera d'ordre métaphysique ou ne sera pas. DESCARTES déclarait hardiment : « L'athée qui constate l'évidence des vérités mathématiques est aussi valablement certain de cette vérité tandis qu'il y pense que peut l'être le croyant. Mais si on lui demandait pourquoi la certitude des Mathématiques en général est assurée, il ne saurait que répondre. » A quoi LEIBNIZ fait écho : « L'athée peut être géomètre mais ne sait pas ce qu'est la Géométrie. »

Mais la question dépasse la Philosophie des sciences pour intéresser la Métaphysique de la certitude et de la vérité
bdp
21-Avr-2024
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