Quelle importance accorder aux facteurs organiques et sociaux. Sont-ils intrinsèques ou extrinsèques?
2. Conditions organiques et sociales.
Nous allons voir qu'il existe un comportement physique de l'attention qui est aussi soumis à l'influence sociale.
2-1) Les conditions organiques.
Il existe un comportement de l'attention : des postures, des attitudes, une certaine position, une mimique traduisant l'effort de concentration et de fixation, une contraction générale du système musculaire et du système nerveux.
On peut aller plus loin et faire une physiologie de l'attention, constater qu'elle s'accompagne de modifications circulatoires et respiratoires, vasomotrices en général, sans parler de l'inévitable dépense d'énergie nerveuse et de l'excitation cérébrale qui en serait la cause.
Mais quel poids faut-il donner aux facteurs de cet ordre? Si l'on en croit RIBOT, les réactions nerveuses et motrices, les phénomènes physiologiques ne sont pas simplement les conditions de l'attention, ce sont ses éléments constitutifs. D'où sa formule célèbre : l'attention n'est pas une attitude de conscience c'est la conscience d'une attitude corporelle. C'est ce qu'on appelle /a théorie motrice.
⌦ Objections.
- La théorie motrice n'est qu'un échantillon de l'épiphénoménisme, cette doctrine qui prétend expliquer la conscience en se passant d'elle et construire une psychologie sans conscience, ce qui est un pur et simple non-sens.
- Si les facteurs physiologiques accompagnent bel et bien l'attention psychique on ne saurait dire qu'ils la constituent. D'ailleurs les modifications circulatoires, respiratoires, cérébrales et autres n'ont absolument rien de spécifique : elles accompagnent tous les faits psychiques sans distinction, elles sous-tendent l'activité mentale dans toutes ses manifestations.
- Reste le comportement mais on sait combien il est équivoque. On ne saurait mesurer l'authenticité de l'attention à de simples signes, sujets à caution. Certes il existe un comportement naturel du processus attentif, mais on sait également qu'il est possible de feindre ou de simuler l'attention par politesse, par discipline voire par ironie.
- Ce qui serait acceptable ce serait de dire que pour favoriser l'attention on peut imposer au corps un certain comportement, une certaine tenue, comme il se voit par exemple dans la méditation et le recueillement.
2-2) Les conditions sociales.
L'attention est essentiellement un phénomène psychologique, non sociologique. Toutefois le psychisme étant toujours sous l'influence sociale, on reconnaîtra que le milieu propose à la conscience des objets, des idées et des valeurs susceptibles de retenir ou de provoquer l'attention. Il suffit de songer à tout ce qui est information, publicité, propagande, et au poids de ces choses dans bien des jugements que l'on croit personnels.
Conscient de l'insuffisance de sa théorie motrice, RIBOT la voulait surtout valable pour l'attention spontanée tandis qu'il faisait de l'attention volontaire un phénomène social, un résultat de l'éducation.
⌦ Objections.
- Si le psychisme est autre chose qu'un tissu de conditions sociales, la volonté et l'attention ne seront pas davantage des phénomènes intrinsèquement sociaux. La question met en cause la conception sociologique de la conscience que nous avons rejetée.
- De plus l'effort d'attention dépend du moi, de la personne singulière qui la donne ou la refuse. Le rôle de la société est d'éduquer un tel pouvoir, qu'elle présuppose en conséquence et qu'elle ne saurait constituer.
- Seule une explication proprement psychologique a chance de satisfaire l'esprit. Faire attention c'est vouloir, c'est veiller, c'est être libre. Tout le reste est extrinsèque.