Modeste Mignon

Titre d'un des plus longs et des plus importants romans de Balzac (1799-1850), qui fait partie des «Scènes de la vie privée » (voir Comédie humaine) qui fut écrit de mars à juillet 1844 et publié la même année. L'œuvre est dédiée « A une étrangère », (la comtesse Hanska), « fille d'une terre esclave, ange par l'amour, démon par la fantaisie, enfant par la fol, vieillard par l'expérience, femme par le cœur ».
La jeune Modeste Mignon, âme passionnée et exquise dans un corps des plus gracieux, vit avec sa mère dans une élégante maison du Havre, surveillée de près par quelques amis de son père. Celui-ci, un noble provençal, Charles Mignon de la Bastie, qui a pris part à toutes les campagnes de l'Empire et épousé la fille d'un riche baron allemand, a fait, après la chute de Napoléon, une rapide fortune dans le commerce havrais. Incapable de supporter la ruine causée par une faillite soudaine, Charles Mignon est parti depuis quatre ans pour tenter de refaire sa fortune dans les mers du Sud. Mais il avait été tellement éprouvé par le malheur arrivé à sa fille aînée, Bettina-Caroline (laquelle s'était enfuie de la maison paternelle avec un séducteur indigne et était morte dans des circonstances tragiques), qu'avant son départ il avait confié à quelques amis sûrs la mission de veiller sur la cadette pendant son absence et de la préserver de tout contact avec le monde.

Modeste, jusqu'ici, n'a aucune intrigue coupable à se reprocher. Toutefois, exaltée par ses lectures, elle est tombée amoureuse du grand poète Canalis : jeune et déjà célèbre, enivré par ses triomphes précoces, Canalis est l'enfant gâté de la haute société parisienne. A la faveur d'un stratagème, la jeune fille entame une correspondance amoureuse avec l'écrivain. Seulement, celui qui répond à ses lettres enflammées par des missives non moins ardentes n'est pas Canalis, mais son secrétaire, le jeune Ernest de la Brière, un homme du meilleur monde, fin et cultivé, timide et sentimental. Ernest, toujours sous son identité d'emprunt, voit Mignon et s'éprend d'elle. Une des amies de Mignon, Anne Dumay, surprend le secret de Modeste, va à Paris pour avoir une explication avec Canalis et découvre la supercherie dans les jours mêmes où Charles Mignon revient des Indes, après fortune faite. Ernest confesse ses sentiments au père de la jeune fille et réussit à triompher de ses préventions, alors que Modeste, blessée profondément par ce qu'elle considère comme une basse tromperie, ne veut plus entendre parler de lui.

Charles Mignon, redevenu le grand seigneur de naguère, invite Canalis (alléché par la perspective d'un riche mariage et intrigué par la curieuse personnalité de Modeste) à venir au Havre avec son secrétaire et leur donne un mois pour que Mignon puisse se prononcer en connaissance de cause. A ces deux prétendants vient s'en ajouter un troisième dans la personne du duc d'Hérouville, gentilhomme breton. Au cours d'une succession de fêtes étincelantes et de réceptions, Canalis et le duc font étalage de toutes leurs qualités, tandis qu'Ernest, de plus en plus désespéré, se tient volontairement dans l'ombre. Modeste, après s'être laissée successivement entraîner vers les deux premiers, se décide enfin pour lui.

Œuvre d'une simplicité exemplaire, malgré la richesse des détails, et le remarquable tableau de la vie provinciale qui sert de cadre à l'intrigue. Modeste Mignon compte parmi les chefs-d’œuvre de Balzac. La libre invention romanesque et le réalisme poussé s'y fondent dans un naturel parfait cette délicieuse étude de jeune fille, passionnée et romantique, contraste avec le portrait de Canalis, écrivain mondain, mi-génial, mi-cabotin, élégiaque et sentimental dans ses vers, calculateur froid et sceptique dans la vie.

bdp
10-Sep-2024
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